01/11/2023

Alphonse Borras : nous sommes tous ensemble, synodalement, pasteurs de l’Église

Par l'abbé Claude Barthe

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Dans un article de la Nouvelle Revue théologique, « La sacra potestas, la seule voie pour la participation des laïcs au gouvernement de l’Église ? » (octobre 2022, pp. 612-628), Alphonse Borras, professeur de droit canonique à l’Université catholique de Louvain, spécialiste enthousiaste de la synodalité[1], membre de la commission doctrinale de l’assemblée du Synode sur la synodalité, propose un contournement du pouvoir de juridiction du pape et des évêques, un contournement synodal.

Le Concile, explique-t-il, tout en conservant sous la sacra potestas le binôme pouvoir d’ordre/pouvoir de juridiction, a mis en valeur la trilogie des fonctions de l’évêque, fonctions prophétique, sacerdotale et royale. Mais ces tria munera sont plus larges que la potestas sacra. Par ailleurs, pourquoi ne pas se souvenir, demande-t-il, que la cura animarum, la sollicitude pour les âmes, incombe à toute la communauté ? Autrement dit que les munera sont l’affaire de tous ?

On délègue à des laïcs, remarque A. Borras, en les nommant chanceliers, chancelières, chargé ou chargées de missions diverses, non une participation au pouvoir sacré, c’est-à-dire à la juridiction, mais une coopération à « l’exercice de ce pouvoir »[2]. On confie aussi à des laïcs des offices non juridictionnels institués ou instituables selon les besoins (canon 145). Mais on peut aussi, encore plus largement, procéder à « l’attribution de charges au service des communautés ou des aumôneries qui ne supposent pas l’intervention de l’autorité compétente pour la provision d’offices (munera). »Autrement dit, des munera confiés et assumés en dehors de l’intervention de l’autorité, des charges d’Église auto-distribuées à la base.

« Pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple ? », demande benoitement notre auteur. Le droit issu du Concile, quand on sait bien le comprendre, permet d’« offrir un autre visage d’Église », un visage vraiment synodal


[1]. Voir son ouvrage : Communion ecclésiale et synodalité, CLD, 2018, où il souligne l’essence démocratique de la synodalité en développant le thème suivant : La synodalité est un processus qui édifie l’Église en suscitant la participation des baptisés à sa mission dans le monde ; elle apparaît alors comme l’un des principes de gouvernance dans l’Eglise.

[2]. Cette subtile distinction est tirée  du canon 129 : « § 1. Au pouvoir de gouvernement qui dans l’Église est vraiment d’institution divine et est encore appelé pouvoir de juridiction, sont aptes, selon les dispositions du droit, ceux qui ont reçu l’ordre sacré. § 2. À l’exercice de ce pouvoir, les fidèles laïcs peuvent coopérer selon le droit. »