17/01/2021

Acolytesses, diaconesses…

Par l'abbé Claude Barthe

Grande est l’émotion suscitée par la lettre apostolique en forme de motu proprio Spiritus Domini, du 11 janvier 2021, qui autorise à conférer les ministères du lectorat et de l’acolytat à des femmes, en modifiant le canon 230 § 1. Confier ainsi des rôles si proches de l’autel à des femmes prépare-t-il l’institution du sacerdoce féminin, contrairement à la tradition constante de l’Église, rappelée dans la lettre Ordinatio sacerdotalis de Jean-Paul II, du 22 mai 1994 ? Certes, mais comme souvent, et contrairement aux apparences, le pontificat actuel ne produit rien de radicalement nouveau, mais développe le plus possible, ce que l’on pourrait appeler les choses conciliaires.

Un des documents les plus révolutionnaires de la réforme liturgique avait été le motu proprio Ministeria quædam, de Paul VI, du 15 août 1972, qui avait aboli cinq des six ordres traditionnels conduisant à l’ordination sacerdotale, l’ostiariat, le lectorat, l’exorcistat, l’acolytat et le sous-diaconat, cursus romain qui datait du IIIe siècle. Paul VI avait aussi aboli la tonsure, qui les précédait et faisait juridiquement entrer dans la cléricature. Il n’avait conservé que le diaconat, par lequel on devenait désormais clerc. Et il créait deux « ministères institués » de lecteur et d’acolyte (il appartenait à ce dernier de servir à l’autel et de donner la communion comme ministre extraordinaire). Ces institutions n’étaient pas des ordinations mais de simples mandats (mais permanents) donnés à des laïcs se préparant au sacerdoce ou ne s’y préparant pas.

Déjà, depuis le début de la réforme, des laïcs, hommes et femmes, en habit de ville entouraient l’autel : lecteurs, distributeurs de la communion (distribution légalisée par l’instruction Immensæ caritatis du 29 janvier 1973). Il existait donc des femmes lectrices et d’autres qui distribuaient la communion. Quant à l’autre fonction des acolytes, le service de l’autel, traditionnellement dévolu dans les paroisses à de jeunes garçons qu’on assimilait pour l’occasion à des clercs en les revêtant de soutanelles ou d’aubes, on prit de plus en plus l’habitude de le confier à des filles – parfois, comme en Allemagne, à de grandes adolescentes – qu’on revêtait de soutanes ou d’aubes. En 1970, c’était encore un « abus » (instruction Liturgicæ instaurationes). Mais en 1994, c’était officiellement permis (réponse de la Congrégation pour le Culte Divin, du 15 mars).

Il n’en est pas moins vrai que la décision de Spiritus Domini va accentuer le phénomène : des dames vont recevoir les institutions du lectorat et de l’acolytat et, concrètement, on verra plus fréquemment des femmes adultes entourer l’autel pour le service de la messe. Et surtout, Spiritus Domini va doucement préparer l’apparition de diaconesses.

Mais là encore, cela sera-t-il une nouveauté ? Très vraisemblablement ces diaconesses seront distinguées de l’ordre diaconal, conféré par l’ordination : elles ne recevront pas un ordre, mais un ministère laïc de diaconat féminin. Or, n’existent-elles pas déjà ces sortes de diaconesses qui accomplissent les fonctions du diacre, donnent la communion, prêchent, baptisent, marient ? On en voit partout distribuant la communion. Et en de nombreux endroits elles président aux funérailles, et y font l’équivalent d’un sermon. Et même certains évêques, rares pour l’instant, comme Mgr Wilmar Santin, évêque d’Itaituba au Brésil, désignent des femmes « ministres du baptême et du mariage ».

Abbé Claude Barthe