01/01/2019

La violation du secret du conclave de 2005

Par Don Pio Pace

Parmi les manœuvres du parti libéral destinées à délégitimer moralement Benoît XVI, il y eut celle qui consista à dévoiler au monde qu’il avait eu un compétiteur très sérieux, Jorge Mario Bergoglio, archevêque de Buenos Aires.
Un cardinal anonyme – on a avancé le nom du cardinal Pompedda, qui n’avait pas participé au conclave pour avoir dépassé les 80 ans, mais avait reçu les confidences de ses amis électeurs – était censé avoir rédigé un « Journal secret du conclave ». La seule chose certaine est qu’un participant au conclave des 18 et 19 avril 2005 avait délibérément violé le secret et encouru (la fin justifie les moyens !) l’excommunication.
Le prétendu « Journal » fut confié à Lucio Brunelli, vaticaniste des notices télévisées de TG2 (c’est le nom des journaux télévisés de la deuxième chaîne de télévision publique italienne, Rai 2). Brunelli le publia le30 août 2009 dans la revue de géopolitique Limes – du groupe de gauche de L’Espresso – sous le titre : « Così eleggemmo papa Ratzinger », Comment nous avons élu le pape Ratzinger. Du jamais vu : Brunelli et le cardinal qui s’était confessé auprès de lui révélaient les résultats des votes, qui avaient été les suivants (sachant que les 2/3 des voix nécessaires pour être élu étaient de 77) :
– 1er tour, lundi 18 avril : Ratzinger 47 ; Bergoglio 10 ; Martini 8 ; voix éparses.
– 2ème tour, mardi 19 avril, 9h30 : Ratzinger 65 ; Bergoglio 35.
– 3ème tour, mardi 19 avril, 11h : Ratzinger 72 ; Bergoglio 40.
Au matin du 19 avril, Bergoglio avait donc rassemblé sur son nom la fameuse minorité de blocage : « Bergoglio monte de 35 à 40, dit l’article de Brunelli. Il dépasse de peu mais il dépasse le seuil qui rend mathématiquement impossible l’élection de Ratzinger. Si les soutiens de l’archevêque de Buenos Aires avaient décidé de résister à outrance, en élevant devant lui le barrage de 40, le cardinal allemand ne pouvait qu’au maximum arriver à 75 voix ».
En réalité, tous les spécialistes des conclaves savent qu’avec une telle avance obtenue aussi rapidement sur un nom – celui de Joseph Ratzinger – aucune minorité de blocage n’est capable de tenir longtemps. Et d’ailleurs, si le blocage avait fonctionné, il aurait abouti à une transaction sur un autre nom que celui des deux cardinaux. Bergoglio eut l’intelligence de se retirer humblement. À 16h30, il retomba à 26 voix et Ratzinger était élu avec 84 voix. Le cardinal qui se « confessait » à Brunelli laissait tirer la morale de l’histoire au Primat des Belges. « Ce conclave montre que l’Église n’est pas encore prête pour un pape latino-américain » sera le commentaire laconique du cardinal belge Danneels .Il faudra attendre 8 ans de plus.

P.P.