Le document Viganó, révélateur d’une crise systémique
Le témoignage explosif publié par Mgr Carlo Maria Viganó, ancien nonce aux États-Unis, révèle une crise ecclésiale majeure. Plus graves que ceux du Père Maciel à la tête des Légionnaires du Christ sont en un sens les agissements effroyables de Theodore McCarrick, cardinal de l’Église romaine qui, tout au long de sa vie, a corrompu des séminaristes et des prêtres. La lecture du document révèle trois phases dans l’affaire. La première : depuis 2000, le cardinal Sodano, Secrétaire d’État, avait été dûment informé de la conduite de McCarrick, comme prêtre et sur ses sièges épiscopaux. Malgré ce, disposant de nombreux soutiens à Rome, notamment à cause des dotations financières qu’il drainait, ce prédateur en série est devenu archevêque de Washington (2000) et cardinal (2001). Deuxième phase : Benoît XVI, comme pour le Père Maciel, imposa en 2009 ou 2010 au cardinal McCarrick, qui avait pris sa retraite en 2006, de se retirer de toute activité publique et de se consacrer la prière et à la pénitence. Troisième phase : en 2013, après l’élection du pape François, dans laquelle il joua un rôle important, malgré les avertissements précis qui lui furent faits par le nonce Viganó, le cardinal McCarrick fut remis par lui à flot et devint un conseiller écouté. Mais, rejoint par la gravité de son dossier, il sera finalement contraint de quitter le cardinalat. Cette troisième phase, durant laquelle McCarrick a été utilisé de manière qu’on pourrait qualifier de machiavélienne, est d’une gravité inexcusable. Mais la première est la plus hautement scandaleuse. Elle s’ajoute, à la fin du pontificat de Jean-Paul II, aux fébriles activités financières des Sodano, Sandri, Martino, du Follieri Group, et à l’émergence de l’affaire Maciel. L’élection de Benoît XVI s’expliquant largement par un désir de purification. Sans doute, à diverses époques de l’histoire, bien des prélats ont plongé dans une scandaleuse mondanisation,mais il semble que, depuis le dernier concile, une porosité toujours plus grande à l’égard d’une modernité oppressante lui enlève toutes ses défenses. C’est très visible dans l’invasion de péchés répugnants, suivis de repentances médiatiques en lieu et place d’une réforme ascétique et spirituelle, mais cela vaut plus encore pour l’aseptisation du message de l’Évangile.